La France a commencé à accueillir les premiers réfugiés ukrainiens sur son territoire. On estime jusqu’à plus de 100.000 le nombre d’entre eux qui pourraient trouver refuge chez nous à terme.
Face à l’urgence, les pouvoirs publics et associations se mobilisent pour pallier aux besoins de première nécessité. Une cellule interministérielle de crise dédiée à l’accueil des Ukrainiens a été ouverte le 10 mars, permettant à ces derniers de bénéficier d’une protection immédiate dès leur arrivée, et d’un certain nombre de droits pour une durée de six mois renouvelables pendant trois ans.
Face à l’urgence, qui plus est lorsque la vie de personnes est en danger, la solidarité est de mise et nous pousse à agir. Je tiens à saluer ici la mobilisation et la générosité des Français à trouver des solutions envers les victimes de cette guerre, qui frappent à notre porte.
Face à l’urgence, il nous faut aussi prendre de la hauteur, penser rapidement à la suite. Quel futur pouvons-nous offrir à ces citoyens déracinés, dont nous ne pouvons que souhaiter un retour rapide dans leurs foyers ?
Comment leur donner non seulement une protection, mais également des perspectives d’avenir – même à court terme – pour se projeter et retrouver au plus vite leur place dans nos sociétés ? Comment transformer notre rôle de citoyen en rôle sociétal, tant vis-à-vis des personnes accueillies que de notre pays ? L’afflux des populations ukrainiennes, qui rappelle d’autres épisodes de notre histoire, nous oblige à répondre à ces enjeux, avec humilité et courage.
Le travail, un levier décisif à l’intégration
En « temps normal », ce sont plus de 40.000 réfugiés qui se voient chaque année octroyer une protection en France. La situation en Ukraine va donc amplifier un phénomène déjà connu, mais encore mal maîtrisé. Une maîtrise d’autant plus difficile que chaque situation a ses propres particularités, comme celle que nous vivons, avec l’arrivée majoritaire de femmes et d’enfants qui ne cherchent pas nécessairement à se fixer sur notre territoire.
Aujourd’hui, un réfugié qui arrive sur notre sol reçoit un statut avant d’être envoyé, selon des quotas, dans différentes régions de France – dont 50% en Ile de France. Une fois installé, il va consacrer entre un an à dix-huit mois à s’intégrer, entre l’apprentissage de la langue, la recherche d’un logement, les démarches administratives… La recherche d’un travail ou d’une formation vient souvent après et parfois trop tard pour choisir une situation en adéquation avec les besoins de la personne.
Or, le travail doit être un levier décisif pour soutenir le processus d’intégration, qu’il soit temporaire ou durable. Chez Actual group, l’insertion des personnes réfugiées dans le monde du travail est une préoccupation depuis plusieurs années, en particulier au travers de notre filiale Envergure qui oriente, accompagne et forme plus de 1000 étrangers par an. En lien avec les pouvoirs publics, nous intervenons dès l’entrée des réfugiés sur le sol français pour gérer la situation traumatique des réfugiés par un plan d’accompagnement humain et la mise à l’emploi.
Un défi sur le long terme
Notre expérience, comme celle de nombreuses autres organisations de la société civile, d’organismes publics ou de groupes informels, montre que le travail, avec sa valeur symbolique et matérielle, est l’un des aspects décisifs sur lequel il faut se concentrer pour favoriser cette intégration. Les politiques d’accueil restent un enjeu dont dépend la résilience du projet européen, mais l’intégration sociale et économique des réfugiés reste le défi à relever sur le long terme.
Fuyant les guerres, les persécutions et la violence, les réfugiés sont contraints de tout laisser derrière eux. Mais ils apportent souvent avec eux leurs compétences, leur professionnalisme et leur talent. Un bagage personnel qu’il faut valoriser et capitaliser, tant pour l’intéressé que pour l’économie de notre pays. Une formation initiale doit par ailleurs être apportée à ceux qui ont un plus faible niveau d’éducation, pour une transition plus rapide vers le marché de l’emploi.
L’insertion dans un contexte de travail facilite par ailleurs l’apprentissage de la langue, ainsi que la connaissance des coutumes et des règles implicites et explicites du pays d’accueil. Tout cela permet aux réfugiés de renforcer leur confiance en eux, de créer un lien avec la communauté et le territoire dans lequel elles vivent.
Une chance pour nos territoires
La mise en relation entre les réfugiés et les territoires en recherche de talents constitue donc un des enjeux majeurs de ce processus d’intégration. Des partenariats doivent se créer ou se renforcer entre les structures d’accueil et les entreprises pour que l’apprentissage théorique puisse rapidement trouver une application pratique sur le terrain et en être ainsi facilité. Alors que nos territoires et nos entreprises souffrent d’un manque de candidats pour un grand nombre de métiers, comment ne pas y voir une double réponse possible à l’enjeu qui se présente à nous ? C’est dans ce sens que j’avais rencontré le préfet Alain Regnier, délégué interministériel chargé de l’accueil et de l’intégration des réfugiés, en 2021, et qu’il nous faut aujourd’hui plus que jamais repenser notre modèle d’intégration.
Identifier les besoins des entreprises et les compétences des personnes réfugiées pour répondre aux enjeux de chacun est un élément clé de cette intégration. Cette ambition qui nous habite chez Actual group, comme dans d’autres organisations qui agissent dans le même sens – Each one, La Fabrique nomade par exemple – nécessite de voir plus loin, en faisant l’effort d’apprendre à se connaître pour trouver des réponses durables, par le travail et l’accompagnement humain.
Mobilisons-nous à tisser une relation positive et constructive entre toutes les composantes engagées dans la crise actuelle en faveur des Ukrainiens, pour faire en sorte que chacun trouve sa place.
En gardant l’espoir que la paix revienne au plus vite.